Longtemps l’animal a été considéré comme dénué d’émotion, être vivant répondant à des lois mécaniques, à l’instar d’une machine, faisant de l’homme l’unique entité capable d’avoir des affects. Si depuis, les scientifiques n’ont cessé de démontrer le contraire par le biais des sciences cognitives et sensorielles, certains comportements animaux continuent de nous étonner. C’est le cas des dauphins face à la mort d’un congénère.
Des animaux qui réagissent à la mort
Plusieurs cas de comportement qualifié de « deuil » chez le dauphin ont été observés de manières fortuites par des amateurs ou des scientifiques, suscitant chez eux une curiosité particulière face à cet événement. Si l’emploi de ce terme est fort, teinté des émotions ressenties par l’homme devant la perte d’un être cher, on peut plutôt parler de réactions face à la mort pour les animaux. Réactions qui laissent supposer qu’ils ne sont pas indifférents à la disparition d’un de leur congénères.
Des dauphins qui portent leur congénère à la surface
La grande majorité des observations relatées sur le comportement de ces cétacés dans cette situation décrivent le même type de scène : un individu ou plusieurs escortent et portent à la surface de l’eau un individu décédé, ralentissant leur vitesse de nage, sur plusieurs kilomètres, parfois même lorsque le corps commence à se décomposer. Ils semblent ne pas vouloir abandonner le cadavre.
Le corps d’un veillé est souvent celui d’un jeune
Ce sont souvent des femelles adultes qui sont vues en train de porter un individu plus jeune, quelques fois des mâles aussi participent à cette « veillé mortuaire ». Bien qu’il ne soit pas possible de l’affirmer, les scientifiques supposent que c’est généralement une mère qui porte son petit décédé, ou éventuellement un membre du groupe auquel il serait attaché et qu’il ne voudrait pas « laisser partir ».
Le deuil, anthropomorphisme ou réalité chez le dauphin ?
Dans le domaine scientifique, il est de mise de ne pas sur interpréter un comportement animal au risque de lui attribuer des capacités qu’il n’aurait pas, ou de l’humaniser en faisant écho à nos ressentis à nous.
Des caractéristiques comportementales qui se rapprochent de celles de l’humain en deuil
Ce type de comportement chez les dauphins est appelé un comportement « épimélétique ». Il fait référence aux réactions des cétacés envers un mourant ou un mort qui se caractérisent par le fait de rester proche de l’individu décédé, de maintenir le contact physique avec lui et de réagir de manière agressive si un « être » s’en approche. Ce sont des comportements que l’on peut également retrouver chez l’humain ou chez les primates non humains lors d’un deuil.
Le dauphin, un animal sociable qui vit en groupe et crée des liens
Généralement, le deuil se fait pour un être avec lequel nous avons créé des liens, auquel nous sommes attachés. Le scientifique, Filipe Alves, qui travaille sur la question, croit que des animaux comme les dauphins, qui vivent dans des grands groupes depuis parfois plusieurs générations, peuvent effectivement porter le deuil.
Si plusieurs hypothèses sont élaborées pour tenter de comprendre ces comportements sous un prisme différent de celui du deuil, il va de soi, selon Barbara J.King, que les animaux ressentent la perte, même s’ils n’appréhendent probablement pas le concept de la mort comme nous.
Crédits photos : Mark Interrante ; OlsenWeb