Parmi les 7 espèces de tortues marines connues à ce jour, la tortue luth, dont le poids atteint les 400 kg en moyenne, est la plus imposante de toutes.
Les tortues luth sont difficilement observables dans leur milieu naturel, de ce fait, les scientifiques profitent de leur passage sur les plages pour la ponte des œufs et de captures fortuites pour les équiper de balises satellites afin de suivre leur migration.
Des distances de migration incroyables
Ayant été observée du nord de l’Alaska au Sud du Chili et de la Nouvelle-Zélande, c’est la tortue marine qui a la répartition géographique la plus vaste dans le monde. Bien que présente dans tous les océans, l’Atlantique regrouperait aujourd’hui environ 70% de la population totale des tortues luth adultes.
De l’éclosion des oeufs à la grande migration
Après une soixantaine de jours d’incubation, les petits éclosent et s’extraient du nid pour se diriger vers la mer, attirés par sa luminosité. Le voyage peut alors commencer.
Malheureusement, du fait de son mode de vie en haute mer et de ses difficultés à s’adapter à la captivité, la tortue luth est mal connue. Les déplacements et activités des juvéniles, une fois qu’ils atteignent l’eau pour la première fois de leur vie, sont très peu étudiés.
Cependant, même s’il reste encore une grande part de mystère sur la migration des adultes, ce sont sur ces derniers que les scientifiques ont acquis le plus de connaissances. Si aucune route de migration précise n’a été mise en évidence, les déplacements des individus semblent être différents en fonction de la population à laquelle ils appartiennent, de la période de ponte et de la disponibilité en nourriture (surtout des méduses dont ils se nourrissent principalement). Ainsi, ces reptiles marins peuvent parcourir jusqu’à 11 000 km par an ! Par exemple, les populations du Pacifique de l’ouest, qui pondent sur les plages Indonésiennes, voyagent de la mer de Chine du Sud à la côte Ouest des Etats-Unis ; certains individus de l’Atlantique Est qui nidifient dans le Golfe de Guinée ont également été suivis dans tout l’Atlantique Sud.
Un retour aux sources pour la ponte des femelles
Durant leur vie, les déplacements de ces tortues marines sont considérables. Cela ne les empêche pas de refaire le voyage en sens inverse pour aller se reproduire près des côtes qui les a vues éclore, et d’aller par la suite pondre sur une plage proche 15 à 25 ans après, une fois la maturité sexuelle atteinte.
Pourquoi connaître les déplacements des tortues luth ?
Avant de mettre en place des actions de conservation pour une espèce, il est primordial de connaître son mode de vie, ses habitudes et son comportement dans son milieu naturel. Ainsi, connaitre leurs lieux de migrations, les activités qu’elles y font et la période à laquelle elles y sont, permet de mieux appréhender les menaces qui pèsent sur elles, comme les pratiques de pêche par exemple.
Des tortues menacées par les activités humaines
En effet, les tortues luths sont des espèces classées comme vulnérables par la liste rouge de l’UICN (l‘Union Internationale pour la Conservation de la Nature), la majorité des autres espèces de tortues marines sont également sur cette liste.
Plusieurs causes sont responsables de leur disparition dont la principale est la capture accidentelle par les engins et filets de pêche, dans lesquels elles se retrouvent piégées et se noient car privées de respiration (les tortues ont des poumons et ont besoin de remonter à la surface pour respirer). Autre cause de leur extinction, la perte et la dégradation de l’habitat naturel dû au développement anarchique des côtes où plusieurs activités humaines (circulation de véhicules sur les plages, pollution lumineuse) empêchent les femelles de pondre leurs oeufs en creusant dans le sable, ou désorientent les jeunes, à la sortie de l’œuf, pour rejoindre la mer.
L’importance de la conservation des tortues luth
Comme l’ensemble des tortues marines, la survie de la tortue luth est essentielle car elle est révélatrice du bon fonctionnement de l’écosystème dans lequel elle vit. Elle peut, grâce à sa longévité, sa sensibilité aux polluants chimiques et biologique et son mode de vie, fournir des informations importantes sur les évolutions à long terme de son environnement et sur différents compartiments des écosystèmes marins. C’est d’ailleurs en partie grâce à son cas, qui a contribué à faire connaître la problématique de la pollution plastique des océans, que certains pays ont interdit le plastique à usage unique. De plus, ce reptile, étant l’un des seuls prédateurs des méduses, a un rôle prédominant dans la régulation de leur population proliférante.
Sources :
https://www.leatherback.org/why-leatherbacks/life-cycle-of-leatherbacks
http://wildwhales.org/speciesid/sea-turtles/leatherback-sea-turtle/
Lalire, M. (2017). STAMM : un modèle individu-centré de la dispersion active des tortues marines juvéniles. Applications aux cas des tortues luths du Pacifique Ouest et de l’Atlantique Nord-Ouest et aux tortues caouannes de l’ouest de l’océan Indien. Thèse pour l’obtention du doctorat de l’université de Toulouse.
Crédits photos : bathyporeia ; U.S. Fish and Wildlife Service Southeast Region